piranha

Je peux très bien me débrouiller sans eux !
Je sais faire cuire les pâtes (même si c’est beaucoup plus compliqué ici, et même celles au sarrasin des nombreux Coréens de La Paz) ; je suis prêt à être indépendant !

Je me construis des nids de couvertures pour la nuit, j’ouvre moi-même mes paquets de croquettes dès qu’on voit le fond de ma gamelle et je sais me servir de la fontaine à eau. Plus facile à utiliser que le robinet, elle est moins violente en débit et moins riche en métaux et bactéries.
Je pourrais très bien vivre tout seul !
J’observe Lison toute la journée. Comment fait-elle ce mélange de graines du matin ? tournesol, quinua, cañahua, amandes, et autres gourmandises à pioupious. Elle les mange elle-même ! Peut-être que les pigeons de notre balcon parisien lui manquent....
Pâtés, saucisses de toutes sortes, rillettes ou boulettes. J’espionne aussi Kevin. Je pourrais sans difficulté reproduire ses recettes. Même s’il est vrai que le hachoir me fait un peu peur et que je doute qu’on me prenne autant au sérieux au marché aux viandes que notre acheteuse de matières premières, qui se repère et est repérée.
Je peux gérer mes deux jardinières à la perfection : taille périodique des carottes, navets et betteraves. La saison basse de la salade est passée, et les pucerons ont débarrassé le plancher de mon jardinet, depuis que poireaux et oignons font la police.

Bref, ils m’ont encore abandonné.
Je voyais bien les préparatifs : mochilas de vacances et le sténopés géant resté dans le labo photo. Ils ne partent donc pas en voiture. Alors peut-être l’avion. Quelle drôle d’idée ! Moi j’en ai pris deux dans ma vie, et je n’ai pas du tout envie de recommencer, mais mes maîtres, eux, décollent 7 fois en 2 semaines. Il faut dire que depuis La Paz, les vols directs sont rares. Bogotá, Lima, Arequipa, Iquique. L’altitude, toujours ; moins de pression et moins d’oxygène. Les avions ne se sauvent pas avec les réservoirs pleins. Et les Boliviens, par manque de sous et d’habitude des voyages, ne volent pas beaucoup. Alors, pour faire Manaus => La Paz, 2750 km à vol d’oiseau, il faut prendre 3 coucous.

Mais qu’ils voyagent !
J’inviterais des amis pour jouer à nos jeux de société : shérif, tueur de monstres ou prisonnier d’un cube, je connais tous ces rôles par cœur. Et pour une bien meilleure ambiance, je remplacerais les goûters sucrés et les pizzas par des orgies de sardines et mimosa.
Je proposerais à Marie de venir de temps en temps. Elle vit maintenant sur le même continent que nous et avec des chats ; bientôt elle m’adorera.
D’autant que je sais d’expérience que tous les félins ne sont pas aussi pacifistes que moi. Les escarmouches de Scarlett m’avaient déjà fait réfléchir sur la compagnie de mes semblables. Mais les duels lancés par mon nouveau covacancier vont peut-être m’amener à une retraite spirituelle loin de tous (à suivre).

Je pourrai continuer à vous donner des nouvelles : j’ai vu souvent mes maîtres préparer ou recevoir lettres et paquets.
Mais les délais risquent d’être plus que variables. Les cartes postales de Savoie mettent parfois plus de 6 mois....
Peut-être que vous me manquerez trop....
Et les câlins de Lison ?
Et les caresses de Kevin ?
Et les canards : rhum ou clarinette, magrets surtout !?

Je dois bien l’avouer, j’ai quand même eu un peu peur qu’ils soient dévorés par de féroces amazoniens. Mais c’est tout le contraire !